Σάββατο 22 Ιανουαρίου 2011

PIOTR GRIGORENKO:MEMOIRES



                             
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« Mon enfance ne fut point d'un enfant »

            PRESS DE LA RENAISSANCE.
              Μετάφραση από τα Ρωσικά:
   DENIS AUTHEIER ET PIERRE GRAZIMIS.
 Je suis né le 16 octobre 1907 à Borissovka, petit village de la région de Zaporojié, dans le sud de l'Ukraine. J'ai très peu de souvenirs de ma première enfance. De ma mère, qui mourut alors que je venais d'avoir trois ans et qui, paraît-il, m'aimait beaucoup, ma mémoire n'a conservé qu'une image : ses cheveux, tels que je les vis briller lorsqu'on la transporta de la chambre où nous dormions dans la « grande pièce » où nous recevions les gens. Ils n'étaient pas tressés et tombaient mollement, en s'évasant, jusqu'à terre. J'étais assis près du mur, face à la fenêtre. Lorsque le corps de maman passa devant, les rayons du soleil couchant, jouant dans ses cheveux, y allumèrent des reflets d'or merveilleux. Cette vision, l'auréole dorée des saints sur les icônes me la rappellera toujours.
Je ne crois pas avoir eu de camarades de jeu. Il n'y avait aucun autre enfant de mon âge dans le voisinage immédiat de notre khata [1]. La première maison, à la droite de la nôtre (en sortant de chez nous), était celle du pope qui n'avait pas d'enfants. Après quoi s'étendait une large bande de terrain bordée de haies, par où passaient les troupeaux. Tout ce qui se trouvait au-delà de cet espace était pour moi un monde inconnu, étrangei, a gauche de chez nous, toujours dans la mime rue,il y avail la maison de mon oncle Alexandre, le frère de mon père. lit là non plus, il n'y avait pas d'enfants. Puis il y avait une ruelle, qui pour moi représentait une autre frontière infranchissable.     


En face de ces quatre maisons, enfin, s'étendait une immense place. Je n'osais pas non plus m'aventurer jusqu'aux trois fermes qui la bordaient du côté opposé, bien que deux d'entre elles fussent habitées par des parents. Sur le côté gauche de la place, non loin de chez nous, se tenait un gros bâtiment de brique rouge, qui me semblait énorme et m'épouvantait par son allure sévère : c'était le grenier communal contenant les provisions de blé pour les mauvaises années. Enfin, un peu plus loin, et un peu en retrait, s'élevait la petite église. Elle était en bois, fait exceptionnel dans le Sud, mais c'est sans doute ce qui faisait son charme. On la repeignait souvent, et c'était un délice de la regarder. Chaque fois que l'on m'emmenait à l'église, j'avais le cœur en fête : cela, je me le rappelle. Depuis, même lorsque j'étais un communiste pur et dur, je n'ai jamais pu revoir sans nostalgie le coin de place où elle s'élevait jadis.
Cependant, j'aurais sans doute fini par surmonter l'obstacle de la place pour aller jouer avec mes cousins, dont certains avaient le même âge que moi. Et j'aurais pu avoir comme camarade de jeu Aliocha, le derniei enfanl de ma grand-mère maternelle. Il n'avait qu'un an de plus que moi. Mais voilà : je n'avais pas le temps de jouer. A cause de mon père. En ces années, il était renfermé, taciturne, très exigeant et très sévère. Il trouvait toujours quelque chose à nous faire faire, ne nous laissait pas un instant de répit. Je passais des étés sans descendre de cheval. Au point que j'en arrivais à croire que j'avais toujours vécu à cheval, que j'étais même né à cheval.
Pendant le battage ou le sarclage, mon père fouettait mon cheval, de temps à autre. Le coup de fouet m'atteignait parfois. Il le faisait sans doute avec les meilleures intentions. Je poussais un cri de douleur, tellement ça me cuisait, et sortais de la somnolence qui me gagnait. Sans ces coups de knout, j'aurais peut-être roulé sous les sabots des chevaux. C'est d'ailleurs ce qui arriva un jour. Tout le monde était parti manger ; moi, j'étais resté sur l'aire, sur mon cheval qui traînait le rouleau à dépiquer. C'était vers midi. Le soleil tapait. Et j'avais commencé à travailler dès l'aube. Un moment, je luttai contre le sommeil qui m'assaillait par vagues successives, puis je m'endormis. Combien de temps me suis-je maintenu, endormi, sur ma monture, je ne saurais le dire. Toujours est-il que j'ai fini par tomber. Si les chevaux avaient continué leur course, le lourd rouleau de pierre qu'ils tiraient serait passé sur moi, et ces mémoires n'auraient jamais été écrits ! Mais ces animaux intelligents s'arrêtèrent, et je sortis d'entre leurs jambes.
Mon père était toujours d'humeur sombre. Sa barbe poussait vite, noire et drue. Il ne la rasait que le dimanche, laissant une fine moustache,avant d' aller à l'église. Je le craignais énormément. Un jour que l'tVais emmené paître les chevaux, je m'aperçus que l'un d'eux avgit pardu sa bride (que j'avais oublié de lui enlever). Je me mets à la cher;  impossible de la trouver.
"Où est passée la bride ? me demanda mon père, alors que je ramenais les animaux.
-Je l' ai perdue, répondis-je, fondant en larmes. 
-Alors cherche-la, au lieu de pleurer !... Et si tu ne la trouves pas, Inutile de te présenter ici, compris[2] ? »
Continuant de pleurer, je retournai aux champs. Je fouillai toute la prairie, sans succès. La nuit tombait. Et bientôt je ne vis plus rien. Mais  l'idée de rentrer à la maison n'effleurait même pas mon esprit. Je continuai d'errer dans le pré, jusqu'au moment où, à bout de forces, je m' écroulai et m'endormis. Dans mon sommeil, j'entendis la voix de mon père, qui m'appelait ; j'aurais voulu me réveiller, mais rien à faire. Tout  à coup, je sens que quelqu'un me prend dans ses bras, des  bras forts, mais doux, et j'entends une voix, caressante comme je n'en nu. jamais entendu, me dire : « Mais qu'est-ce qui t'a pris, petit nigaud ? J'allais quand même pas te manger ! » Et il se mit à pleurer.La chaleur  de son corps me gagnait, et pour la première fois de ma vie, je  m'accrochai à son cou.
Il était tard, les lendemain, quand je rouvris les yeux. Pour une fois,on ne  m'avait pas réveillé au point du jour. Mon père, que je rencontrai sur le seuil de la maison, me dit : « Emmène les moutons aux champs, et après, retourne ici manger. » Il avait toujours le même ton
bourru, mais ce jour-là je m'aperçus que ses yeux, au contraire, étaient pleins de tendresse. Par la suite, en écoutant babouchka Tatiana (ma grand mère maternelle), j'appris que papa n'avait pris cet air sévère Qu'après la mort de maman. Jusqu'alors, il était gai, et aimait parler et . hanter. Maman aussi chantait beaucoup. Quand ils revenaient des champs, me racontait babouchka, on les entendait par tout le village. On les avait surnommés les rossignols. Toute la journée la maison résonnait de leurs chansons.
Aujourd'hui encore, je crois parfois entendre mes parents chantant iliins leur khala ; et pourtant, ce n'est qu'un souvenir indirect. Mais les gens qui chantaient dans les rues et par les chemins ces chants qui retentissaient  d'un bout à l'autre du village, je me souviens bien de les avoir pntendus ; et lorsque, bien des années plus tard, j'ai retrouvé les villages  muets, ce souvenir m'a fendu le cœur : la chanson paysanne avait été assassinée.
Babouchka Tatiana me parlait aussi de l'histoire d'amour de mes pan nts Mon père était d'une famille très pauvre. Il était encore très.......


[1] Habitation paysanne en Ukraine (N.d.T.).
[2]  Toutes les conversations concernant des problèmes quotidiens de l'enfance et de l'adolescence de Grigorenko sont en ukrainien (N.d.T.).

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